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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS FRUITS

Fraas[1] affirme qu’elle n’est pas sauvage en Grèce, ce qui est confirmé par M. de Heldreich[2] pour l’Attique ; Steven l’affirme également pour la Crimée[3]. S’il en est ainsi près de l’Asie Mineure, à plus forte raison faut-il l’admettre pour le reste de l’Europe.

Malgré l’abondance des Pruniers cultivés jadis par les Romains, les peintures de Pompeia n’en indiquent aucune sorte[4].

Le Prunus domestica n’a pas été trouvé non plus dans les restes des palafittes d’Italie, de Suisse et de Savoie, où l’on a rencontré cependant des noyaux des Prunus insititia et spinosa.

De ces faits et du petit nombre de mots attribuables à l’espèce dans les auteurs grecs, on peut inférer que sa demi-naturalisation ou quasi-spontanéité en Europe a commencé tout au plus depuis 2000 ans.

On rattache au Prunier domestique les pruneaux, prunes Damas et formes analogues.

Prunier proprement dit. — Prunus insititia, Linné[5]. — Pflauenbaum et Haferschlehen des Allemands.

Il existe, à l’état sauvage, dans le midi de l’Europe[6]. On l’a trouvé également en Cilicie, en Arménie, au midi du Caucase et dans la province de Talysch, vers la mer Caspienne[7]. C’est surtout dans la Turquie d’Europe et au midi du Caucase qu’il paraît bien spontané. En Italie et en Espagne il l’est peut-être moins, quoique de bons auteurs, qui ont vu la plante sur place, n’en doutent pas. Quant aux parties de l’Europe situées au nord des Alpes, jusqu’en Danemark, les localités indiquées sont probablement le résultat de naturalisations à la suite des cultures. L’espèce s’y trouve ordinairement dans les haies, non loin des habitations, avec une apparence peu spontanée.

Tout cela s’accorde assez bien avec les données historiques et archéologiques. Les anciens Grecs distinguaient les Coccumelea de leur pays d’avec ceux de Syrie[8] d’où l’on a inféré que les premiers étaient les Prunus insititia. C’est d’autant plus vraisemblable que les Grecs modernes l’appellent Coromeleia[9]. Les Albanais disent

  1. Fraas, Syn. fl. class., p. 69.
  2. Heldreich, Pflanzen attischen Ebene.
  3. Steven, Verzeichniss Halbinseln, 1, p. 472.
  4. Comes, Ill. plante pompeiane.
  5. Insititia veut dire étranger. C’est un nom bizarre, puisque toute plante est étrangère ailleurs que dans son pays.
  6. Wilkomm et Lange, Prodr. fl. hisp., 3, p. 244 ; Bertoloni, Fl. ital. 5, p. 135 ; Grisebach, Spicilegium fl. Rumel., p. 85 ; Heldreich, Nutzpfl. Griechenlands, p. 68.
  7. Boissier, Fl. orient., 2, p. 651 ; Ledebour, Fl. ross., 2, p. 5 ; Hohenacker, Plantæ Talysch., p. 128
  8. Dioscorides, l. c., 173 ; Fraas, l. c.
  9. De Heldreich, Nutzpflanzen Griechenl., p. 68.