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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS FRUITS

connaissance lors de leur captivité à Babylone. D’ailleurs l’historien Josèphe dit que, de son temps, les Juifs portaient à leur fête des pommes de Perse, malum persicum, et c’est un des noms du cédrat chez les Grecs.

Les variétés à fruit très acide, comme le Limonum et l’acida, n’ont peut-être pas attiré l’attention aussi promptement que le Cédratier, cependant l’odeur aromatique intense, dont parlent Théophraste et Dioscoride, parait les indiquer. Ce sont les Arabes qui ont étendu beaucoup la culture du Limonier (Citronnier des Français) en Afrique et en Europe. D’après Gallesio, ils l’ont portée, dans le Xe siècle de notre ère, des jardins de l’Oman en Palestine et en Égypte. Jacques de Vitry, dans le XIIIe siècle, décrit très bien le limon, qu’il avait vu en Palestine. Un auteur, appelé Falcando, mentionne, en 1260, des « Lumias » très acides, qu’on cultivait autour de Palerme, et la Toscane les avait aussi à la même époque[1].

Oranger. — Citrus Aurantium, Linné (excl. var. γ). Citrus Aurantium Risso.

Les Orangers se distinguent des Pompelmouses (C. decumana) par l’absence complète de poils sur les jeunes pousses et sur les feuilles, par un fruit moins gros, toujours de forme sphérique, par la peau de ce fruit moins épaisse ; et des Cédratiers (C. medica) par les fleurs entièrement blanches, le fruit jamais allongé, sans mamelon au sommet, à peau peu ou point bosselée, médiocrement adhérente avec la partie juteuse.

Ni Risso dans son excellent traité du Citrus, ni les auteurs modernes, comme Brandis et sir Joseph Hooker, n’ont pu indiquer un autre caractère que la saveur pour distinguer l’Oranger à fruits plus ou moins amers, soit Bigaradier, de l'Oranger proprement dit, à fruit doux. Cette différence me paraissait si peu de chose, au point de vue botanique, lorsque j’ai étudié la question d’origine en 1855, que j’inclinais à considérer, avec Risso, les deux sortes d’Orangers comme de simples variétés. Les auteurs actuels anglo-indiens font de même. Ils ajoutent une troisième variété, qu’ils nomment Bergamia, pour la Bergamote, dont la fleur est plus petite et le fruit sphérique ou pyriforme, plus petit que l’orange commune, aromatique et légèrement acide.

Cette dernière forme n’a pas été trouvée sauvage et me parait plutôt un produit de la culture.

On demande souvent si les oranges douces donnent quand on les sème des oranges douces, et les bigarades des oranges amères. C’est assez indifférent au point de vue de la distinction en espèces ou variétés, car nous savons que, dans les deux règnes, tous les caractères sont plus ou moins héréditaires, que certaines

  1. Targioni, l. c. p. 217.