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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS FRUITS

de plus en plus fort, car, malgré l’augmentation considérable des Anonacées décrites, on ne pouvait citer aucun Anona et même aucune Anonacée à ovaires soudés qui fût originaire d’Asie. J’admettais[1] la probabilité que l’espèce venait des Antilles ou de la partie voisine du continent américain ; mais par inattention j’attribuai cette opinion à M. Brown, qui s’était borné à revendiquer une origine américaine en général[2].

« Depuis, des faits de diverse nature ont confirmé cette manière de voir.

« l’Anona squamosa a été trouvé sauvage en Asie, avec l’apparence plutôt d’une plante naturalisée ; en Afrique, et surtout en Amérique, avec les conditions d’une plante aborigène. En effet, d’après le Dr Royle[3], cette espèce a été naturalisée dans plusieurs localités de l’Inde ; mais il ne l’a vue, avec l’apparence d’une plante sauvage, que sur les flancs de la montagne où est le fort de Adjeegurh, dans le Bundlecund, parmi des pieds de Teck. Lorsqu’un arbre aussi remarquable, dans un pays aussi exploré par les botanistes, n’a été signalé que dans une seule localité hors des cultures, il est bien probable qu’il n’est pas originaire du pays. Sir Joseph Hooker l’a trouvé dans l’île de Santiago, du Cap-Vert, formant des bois sur le sommet des collines de la vallée de Saint-Dominique[4]. Comme l’A. squamosa n’est qu’à l’état de culture sur le continent voisin[5] ; que même il n’est pas indiqué en Guinée par Thonning[6], ni au Congo[7], ni dans la Sénégambie[8], ni en Abyssinie ou en Égypte, ce qui montre une introduction récente en Afrique ; enfin, comme les îles du Cap-Vert ont perdu une grande partie de leurs forêts primitives, je crois dans ce cas à une naturalisation par des graines échappées de jardins. Les auteurs s’accordent à dire l’espèce sauvage à la Jamaïque. On a pu autrefois négliger l’assertion de Sloane[9] et de P. Brown[10], mais elle est confirmée par Mac-Fadyen[11]. De Martius a trouvé l’espèce dans les forêts de Para[12] localité assurément d’une nature primitive. Il dit même : « Sylvescentem in nemoribus paraënsibus inveni, » d’où l’on peut croire que les arbres formaient à eux seuls une forêt. Splitgerber[13] l’avait trouvée dans les forêts de Surinam, mais il

  1. Mém. Soc. phy. et d’hist. nat. de Genève, p. 19 du mém. tiré à part.
  2. Voyez Botany of Congo et la traduction allemande "des œuvres de Brown, qui a des tables alphabétiques.
  3. Royle, Ill. Himal., p. 60.
  4. Webb, dans Fl. Nigr., p. 97.
  5. Ibid., p. 204.
  6. Thonning, Pl. Guin.
  7. Brown, Congo, p. 6.
  8. Guillemin, Perrottet et Richard, Tentamen fl. Seneg.
  9. Sloane, Jam., II, p. 168.
  10. P. Brown, Jam., p. 257.
  11. Mac-Fadyen, Fl. Jam., p. 9.
  12. De Martius, Fl. Bras., fesc. 2, p. 15.
  13. Splitgerber, Nederl. Kruidk. Arch., 1, p. 230.