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JUTE

Le C. capsularis a été introduit dans divers pays intertropicaux d’Afrique ou même d’Amérique, mais il n’est cultivé en grand, pour la production des fils de jute, que dans l’Asie méridionale, surtout au Bengale.

Le Corchorus olitorius est plus usité comme légume que pour les fibres. Hors d’Asie, il est employé uniquement pour les feuilles. C’est une des plantes potagères les plus communes des Égyptiens et Syriens modernes, qui la nomment en arabe Melokych, mais il n’est pas probable que les anciens en aient eu connaissance, car on ne cite aucun nom hébreu[1]. Les habitants actuels de la Crète la cultivent sous le nom de Mouchlia[2], évidemment tiré de l’arabe, et les anciens Grecs ne la connaissaient pas.

D’après, les auteurs[3], ce Corchorus est spontané dans plusieurs provinces de l’Inde anglaise. Thwaites dit qu’il est commun dans les parties chaudes de Ceylan, mais à Java Blume l’indique seulement dans les décombres (in ruderatis). Je ne le vois pas mentionné en Cochinchine et au Japon. M. Boissier (Fl. or.) a vu des échantillons de Mésopotamie, de l’Afghanistan, de Syrie et d’Anatolie, mais il donne pour indication générale : « Culta et in ruderatis subspontanea. » On ne connaît pas de nom sanscrit pour les deux Corchorus cultivés[4].

Quant à l’indigénat en Afrique, M. Masters, dans Oliver, Flora of tropical Africa (1, p. 262), s’exprime ainsi : « Sauvage, ou cultivé comme légume dans toute l’Afrique tropicale. » Il rapporte à la même espèce deux plantes de Guinée que G. Don avait décrites comme différentes et sur la spontanéité desquelles il ne savait probablement rien. J’ai un échantillon du Cordofan recueilli par Kotschy, n° 45, « au bord des champs de Sorgho. ». Le seul auteur, à ma connaissance, qui affirme la spontanéité est Peters. Il a trouvé le C. olitorius « dans les endroits secs et aussi dans les prés aux environs de Seha et de Tette. » Schweinfurth ne l’indique dans toute la région du Nil que comme cultivé[5]. Il en est de même dans la flore de Sénégambie de Guillemin, Perrotet et Richard.

En résumé, le C. olitorius paraît spontané dans les régions d’une chaleur modérée de l’Inde occidentale, du Cordofan et probablement de quelques pays intermédiaires. Il se serait répandu du côté de Timor et jusque dans l’Australie septentrionale (Bentham, Fl. austr.), en Afrique et vers l’Anatolie à la suite d’une culture qui ne date peut-être pas de plus loin que l’ère chrétienne, même dans son point d’origine.

Malgré ce qu’on répète dans beaucoup d’ouvrages, la culture de

  1. Rosenmüller, Bibl. Naturgeschichte.
  2. Von Heldreich, Die Nutzpflanzen Griechenlands, p. 53.
  3. Masters, dans Hooker, Fl. brit. India, 1, p. 397 ; Aitchison, Catal. Punjab, p. 23 ; Roxburgh, Fl. ind., 2, p. 581.
  4. Piddingdon, Index.
  5. Schwemfurth, Beiträge z. Fl. Æthiop., p. 264.