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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS TIGES OU FEUILLES

Le Linum ambiguum de Jordan croît sur la côte de Provence et du Languedoc, dans les endroits secs[1].

Enfin le Linum angustifolium, dont le précédent diffère à peine, présente une habitation bien constatée et assez vaste. Il croît spontanément, surtout sur les collines, dans toute l’étendue de la région dont la mer Méditerranée est le centre, savoir dans les îles Canaries et Madère, au Maroc[2], en Algérie[3] et jusque dans la Cyrénaïque[4], au midi de l’Europe jusqu’en Angleterre[5] jusqu’aux Alpes et aux Balkans, et enfin en Asie, du midi du Caucase[6] au Liban et à la Palestine[7]. Je ne le vois pas mentionné en Crimée, ni au delà de la mer Caspienne. Voyons ce qui concerne la culture, destinée le plus souvent à fournir une matière textile, souvent aussi à donner de l’huile ou, chez certains peuples, une matière nutritive au moyen des graines. Je me suis occupé de la question d’origine, en 1855[8]. Elle se présentait alors de la manière suivante :

Il était démontré surabondamment que les anciens Égyptiens et les Hébreux se servaient d’étoffes de lin. Hérodote l’affirmait. On voit d’ailleurs la plante figurée dans les dessins de l’ancienne Égypte, et l’examen au microscope des bandelettes qui entourent les momies ne laisse subsister aucun doute[9]. La culture du Lin était ancienne en Europe, par exemple chez les Celtes, et dans l’Inde, d’après les notions historiques. Enfin des noms vulgaires très différents indiquaient aussi une culture ancienne ou des usages anciens dans divers pays. Le nom celte Lin et gréco-latin Linon ou Linum n’a aucune analogie avec le nom hébreux Pischta[10] ni avec les noms sanscrits Ooma (prononcez Ouma), Atasi, Utasi[11]. Quelques botanistes citaient le Lin comme « à peu près spontané » dans le sud-est de la Russie, au midi du Caucase et dans la Sibérie occidentale, mais on ne connaissait pas une véritable spontanéité. Je résumais alors les probabilités en disant : « L’étymologie multiple des noms, l’ancienneté de la culture en Égypte, en Europe et dans le nord de l’Inde à la fois,

  1. Jordan, cité dans Walpers, Annal., vol. 2, et dans Heer, l. c., p. 22.
  2. Ball, Spicilegium fl. marocc., p. 380.
  3. Munby, Catal., éd. 2, p. 7.
  4. Robif, d’après Cosson, Bull, Soc. bot. de Fr., 1875, p. 46.
  5. Planchon. l. c., Bentham, Handbook of brit. fl. éd. 4, p. 89.
  6. Planchon, l. c.
  7. Boissier, Fl. or., 1, p. 861.
  8. A. de Candolle, Géogr. bot, raisonnée, p. 833.
  9. Thomson, Annals of philos., juin 1834 ; Dutrochet, Larrey et Costaz, Comptes rendus de l’Acad. des sc., Paris, 1837, sem. 1, p. 739 ; Unger, Bot. Stretfzüge, 4, d. 62.
  10. On a traduit d’autres mots hébreux par lin, mais celui-ci est le plus certain. Voir Hamilton, La botanique de la Bible, Nice, 1871, p. 58.
  11. Piddington, Index Ind. plants ; Roxburgh, Fl. ind., éd. 1832, 2, p. 110. Le nom Matusee (prononcez Matousi) indiqué par Piddington, appartient à d’autres plantes, d’après Ad. Pictet, Origines indo-europ., éd. 2, vol. 1, p. 396.