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plètement. Fortune[1], qui a si bien examiné la culture du Thé en Chine, ne parle pas de la plante spontanée. M. H. Fontanier[2] affirme que le Thé croit généralement à l’état sauvage en Mandschourie. Il est probable qu’il existe dans les districts montueux du sud-ouest de la Chine, où les naturalistes n’ont pas pénétré jusqu’à présent. Loureiro le dit « cultivé et non cultivé » en Cochinchine[3]. Ce qui est plus certain, les voyageurs anglais l’ont recueilli dans l’Assam supérieur[4] et la province de Cachar[5]. Ainsi le Thé doit être indigène dans les pays montueux qui séparent les plaines de l’Inde de celles de la Chine, mais l’emploi des feuilles n’était pas connu jadis dans l’Inde.

La culture du Thé, introduite aujourd’hui dans plusieurs colonies, donne des résultats admirables à Assam. Non seulement le produit y est d’une qualité supérieure à la moyenne des thés de Chine, mais la quantité obtenue augmente rapidement. En 1870, on a récolté dans l’Inde anglaise treize millions de livres de thé, en 1878 trente-sept millions, et l’on espérait pour 1880 une récolte de soixante et dix millions de livres[6] ! Le Thé ne supporte pas la gelée et souffre par la sécheresse. Comme je l’ai dit une fois[7], les conditions qui le favorisent sont tout à fait l’opposé de celles qui conviennent à la vigne. On m’a objecté que le thé prospère aux îles Açores, où l’on a du bon vin[8] ; mais on peut cultiver dans les jardins ou sur une petite échelle bien des plantes qui ne donnent pas, en grand, des produits rémunérateurs. On a de la vigne en Chine, et la vente des vins y joue un très petit rôle. Inversement aucun pays de vignobles n’a donné du thé pour l’exportation. Après la Chine, le Japon et Assam, c’est à Java, à Ceylan et au Brésil qu’on fait le plus de thé, et assurément on n’y cultive pas du tout ou fort peu la vigne, tandis que les vins de régions sèches, comme l’Australie, le Cap, etc., se répandent déjà dans le commerce.

Lin. — Linum usitatissimum, Linné.

La question de l’origine du Lin, ou plutôt des Lins cultivés, est une de celles qui ont donné lieu aux recherches les plus intéressantes.

Pour comprendre les difficultés qu’elle présente, il faut d’abord se rendre compte des formes, très voisines, que les au-

  1. Fortune, Three years wandering in China, 1 vol. in-8o.
  2. Fontanier, Bulletin soc. d’acclimatation, 1870, p. 88.
  3. Loureiro, Fl. cochinch., p. 414.
  4. Griffith, Reports ; Wallich, cité par sir J. Hooker, Flora of brit. India, I, p. 293.
  5. Anderson, cité par sir J. Hooker.
  6. The colonies and India, d’après le Gardener’s Chronicle, 1880, I, p. 659.
  7. Discours au congrès bot. de Londres, en 1866.
  8. Flora, 1868, p. 64.