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zaine de monastères. Trois de ses portes sont bouchées, ses poternes ont été démolies, ses faubourgs ont été rasés, son torrent de Suzon s’est précipité aux égouts, sa population a secoué ses feuilles, et sa noblesse est tombée en quenouille. — Hélas ! on voit bien que le duc Charles et sa chevalerie, partis — il y aura bientôt quatre siècles[1] — pour la bataille, n’en sont pas revenus.

» Et moi, j’errais parmi ces ruines comme l’antiquaire qui cherche des médailles romaines dans les sillons d’un castrum, après une grosse pluie d’orage. Dijon expiré conserve encore quelque chose de ce qu’il fut, semblable à ces riches Gaulois qu’on ense-

    premiers chevaliers de la Toison d’Or institués par Philippe-le-Bon ; le beau vaissel où l’on conservait une hostie miraculeuse et sur lequel brillait, aux jours de fêtes, la couronne d’or que le roi Louis XII, relevant d’une dangereuse maladie, en 1505, avait envoyée au chapitre par deux hérauts ? — Le temps a fait un pas et la terre a été renouvelée, dit quelque part M. de Chateaubriand.

  1. Charles-le-Téméraire, dernier duc de Bourgogne, fut tué à la bataille de Nancy, le dimanche 5 janvier 1476.