Page:Aloysius Bertrand - Gaspard de la nuit, édition 1920.djvu/211

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Le chevalier (faisant la grimace après avoir tout bu) : — Il est aigre ton vin ; tu mériterais, vassal, que je te brisasse ta gourde sur les oreilles. »

Le clerc du gai savoir approcha, sans mot dire, l’archet de son rebec et joua l’air magique de Jehan de Vitteaux.

Cet air eût délié les jambes d’un paralytique. Or voilà que le chevalier dansait sur la pelouse, son épée appuyée contre l’épaule comme un hallebardier qui va-t-en guerre.

« Merci ! nécroman », cria-t-il bientôt, hors d’haleine. Et il giguait toujours.

« Oui-dà ! payez-moi d’abord mon vin, ricana le musicien. Vos agneaux d’or, s’il vous plaît, ou je vous mène, ainsi dansant, par les vallées et les bourgs, au pas d’arme de Marsannay !

— Tiens, — dit le chevalier, après avoir