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L’AVIATEUR INCONNU

votre esprit moqueur, vous devez adorer les farces !

— Mais pas du tout, je suis entièrement sérieux dans la vie.

— Dans la vôtre, peut-être. Mais pas dans celle des autres… Enfin, revenons à ce que vous disiez. Quel sujet auriez-vous d’être chagrin si j’avais eu, comme Elvire…

— Qui ça, Elvire ?

Mlle Bergemont. Si j’avais eu, comme elle, les aviateurs en abomination ?

— Mademoiselle, répondit de Jarcé, je ne tiens nullement à votre antipathie.

— Et à ma sympathie, est-ce que vous y tenez ?

Cette riposte, que Flossie ne fit pas attendre, car elle avait, du flirt, une expérience surprenante, troubla quelque peu Henri de Jarcé par sa netteté même. D’autant plus que, Flossie, en parlant, avait coutume de ne pas quitter du regard son interlocuteur… Et quel regard ! pétillant de malice, chargé d’effluves ! Ah ! quand la belle parente des Bergemont voulait plaire, elle y réussissait au delà de toute espérance.

Pour retrouver une atmosphère moins étourdissante, l’officier, au lieu de répondre, questionna :

— A-t-on revu, dans le ciel de Pourville, l’aviateur fantôme ?

— Non, dit Flossie.

— Il a dû se lasser… Ça ne laisse guère de place aux réalités, une semblable poursuite. Notez que je parle au hasard, n’ayant eu qu’un récit fort succinct de ces raids insolites… J’aime à croire que Mlle Bergemont ne m’en a pas donné une version exagérée ?

— Elle est restée au-dessous de la vérité. Mais, entre-nous, je ne m’explique pas son indignation, sa mauvaise humeur… Si j’étais à sa place, je prendrais l’aventure avec plus de simplicité… et surtout, j’y verrais moins de sarcasme que de courtoisie !

— Je vous approuve en tous points, dit Henri de Jarcé, vous me paraissez avoir une compréhension plus exacte, vous, étrangère, que Mademoiselle votre nièce.

— C’est possible, mais il faut considérer que ma nièce est une jeune fille et, par conséquent, un peu plus ombra­geuse au point de vue sentimental. Convenez que l’offen­sive dirigée contre elle a un caractère assez brusque.