jamais ressenti, au moment où l’avion paraît, le besoin de l’avoir à tes côtés, de s’appuyer sur son affection ?
Elvire murmura :
— Peut-être, mais à quoi bon ! Jean-Louis ne peut être auprès de moi dans cette maison et je ne puis décemment me précipiter à sa recherche !
— Demeure-t-il très loin d’ici ?
— Mais non. Il habite, juste en face le Casino, une petite maison rose, une maison à pergola. C’est la seule du pays, d’ailleurs.
— J’ai grande envie, prononça Flossie, d’aller l’interviewer sur ce raid nocturne.
— Toi, quelle idée !
— Pas si étrange ! j’aimerais savoir quelles sont ses impressions, et, surtout, s’il est aussi attentif que tu le crois !
— Ah ! Flossie, fit la jeune fille d’un petit ton réprobateur, tu es tentée d’accuser Jean-Louis d’indifférence, je t’assure que tu as tort !
— Soit ! mais, enfin, j’aurais plaisir à voir sa physionomie à l’instant même où l’avion de son rival se profile sur l’horizon. Laisse-moi faire ; j’y vais de ce pas.
— Comment, tu vas sortir maintenant ?
— Le temps de passer une robe, répliqua l’Anglaise qui, déjà, s’habillait.
— Je ne suis pas autant que toi, ma chère Elvire, prisonnière du décorum, et l’idée de me promener au petit jour ne me paraît pas si subversive. Et puis, à défaut de Jean-Louis en personne, tu auras tout au moins une traductrice fidèle de ses sentiments.
— Mais, Flossie, tu es folle !
— Qui sait, qui sait ! Je t’en prie, permets-moi d’exécuter mon projet.
Et malgré la résistance d’Elvire, qui ne concevait point que l’on pût avoir une lubie semblable et à son avis si parfaitement inutile, l’entreprenante Flossie alla tirer les verrous de la porte d’entrée et se glissa au dehors, sans être aperçue des frères Bergemont, dont les chambres s’ouvraient sur la façade opposée.
Il ne lui fallut pas longtemps pour repérer le logis de Jean-Louis Vernal grâce à l’indication fort précise de la pergola. Insoucieuse de ce que pouvaient penser les curieux aux aguets, à supposer qu’il y en eût à cette heure