Le peintre se hâta de la rassurer :
— Dame ! J’espérais que M. Bergemont avait tenu des propos purement fantaisistes, sans rapport avec ses intentions réelles. Mais si je me suis trompé, s’il est foncièrement décidé à vous marier à un aviateur, le message de cette nuit prend, à mes yeux, le caractère d’un danger sérieux…
— En d’autres termes…
— En d’autres termes, Elvire aimée, je verrais ma propre candidature fort compromise si un aviateur surgissait pour de bon !
— Rassurez-vous, Jean-Louis, cette éventualité ne se présentera pas !
— Hé ! hé ! voici déjà un inquiétant prélude. Aujourd’hui un message, la carte de visite… Demain, peut-être…
— Mais aucun aviateur ne s’occupe de moi, excepté pour se moquer !
— Ni vous ni moi ne pouvons l’affirmer, ma chérie ! Le hasard est grand, Pourville est fréquenté, les lieutenants du centre d’aviation voisin y viennent chaque semaine. L’un d’eux a pu vous exprimer un peu cavalièrement sa sympathie, dans le moment même où votre père se jurait d’avoir un aviateur pour gendre. On a vu de ces coïncidences, vous savez…
— Mais on n’a jamais vu, en revanche, fit Elvire d’une voix altérée, un fiancé douter de celle qui lui a voué sa vie. Quand bien même un de ces lieutenants dont vous parlez viendrait combler les vœux de mon père, oubliez-vous que ma volonté, à moi, est la seule qui compte ?
Le pauvre Vernal, épouvanté d’avoir méconnu, ne fût-ce qu’un instant, la tendresse et la fierté de la jeune fille, éprouva un serrement de cœur indicible ! Il dit, et une poignante sincérité vibrait dans ses paroles.
— Mon amour, ma bien-aimée, pouvez-vous croire que j’aie attenté à notre mutuelle confiance !… Mais non, mais je le sais que nous sommes unis, quoi qu’il advienne !… nos sentiments confondus nous arment contre toutes les vicissitudes ! Ce que j’ai voulu indiquer, ma chère chérie, c’est que l’intervention d’un rival agréé d’avance par votre père serait de nature à nous causer beaucoup de tourment et de désordre !
— Oh ! nous ne sommes plus sous l’ancien régime, un