On s’étonna bien un peu, chez les Bergemont, de voir revenir Flossie à une heure qui ne correspondait à aucun train arrivant à la gare de Dieppe qui dessert Pourville, mais la jeune femme était trop foncièrement indépendante pour qu’il fût possible de lui faire subir le moindre questionnaire. Seule, Elvire, instruite de son escapade, la pressa de lui en faire le récit.
— Oh ! je n’ai été témoin d’aucune prouesse, lui dit Flossie, j’ai vu M. de Jarcé comme je m’y attendais, mais la visite du camp ne m’a pas extrêmement intéressée, je dois en convenir !
— Au moins as-tu insisté pour qu’il nous aide à identifier l’Aviateur inconnu ?
— Oui, mais en pure perte ! Ce serait un tort de compter sur lui pour venir à bout de l’énigme. Aussi n’en avons-nous guère parlé !
En quoi elle était rigoureusement sincère, puisque, si elle avait découvert Jean-Louis sous son harnachement d’emprunt, le capitaine n’y avait été pour rien. Néanmoins, cette déclaration déçut la jeune fille.
— Je m’aperçois, prononça-t-elle, que les assiduités dont je suis l’objet ont eu pour conséquence principale d’orienter ta curiosité vers les choses de l’aviation ! M. de Jarcé ne t’est pas indifférent, me semble-t-il !
— C’est tout à fait un agréable gentleman, répliqua Flossie.
— Soit ! mais, en attendant…
Flossie ne lui permit pas d’achever. Elle la prit dans ses bras et, gentiment, du ton le plus affectueux et le plus persuasif :
— Darling, te rappelles-tu mon premier conseil ? Je t’ai recommandé la patience ! Aujourd’hui moins que jamais il ne faut t’énerver !
— Pourquoi aujourd’hui ?
— Je te répondrai comme aux enfants : « Parce que ! » Attendons, espérons ! Au fait, l’Aviateur est-il venu cette nuit ?
— Non !
— Tant mieux ! As-tu vu M. Vernal hier soir ?