Page:Allumez vos lampes, s'il vous plaît, 1921.djvu/86

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Nous en sommes donc au point culminant de son article, et voici ce qu’il y fait éclater : « Un grand nombre d’éducateurs, surtout dans les collèges commerciaux, ont résolument sacrifié, par inconscience ou parti pris, une part considérable de la tradition française. Seuls, les tenants irréductibles de la vieille culture classique ont voulu faire de notre peuple, d’abord un peuple d’esprit français, un peuple de commerçants ensuite. On le leur reproche assez vertement. Qui a raison, qui a tort ? (page 353).

Ceux qui ont tort, mon R. Père, sont ceux qui oublient trop facilement ce précepte de la divine Sagesse : « Ne blâmez personne avant de vous être informés s’il est coupable, et alors seulement reprenez-le avec équité s’il y a lieu » (Ecel. XI. 7). Lisez les articles de M. J.-Ed. Mignault, de J.-Hector Kamel, celui de Madeleine, dans la Revue Moderne du 15 novembre, et si vous n’êtes point d’esprit opiniâtre, vous regretterez certainement cette accusation mal fondée, vous ferez bien. Et vous ferez encore mieux si vous présentez de loyales excuses à ceux que vous avez lésés. Peut-être votre édifiant exemple engagera-t-il votre collaborateur d’occasion à « L’Action Française, » M. le Chanoine D. Gosselin, à se renseigner avant d’accuser les instituteurs primaires de vouloir mettre la langue anglaise sur un pied d’égalité avec la langue française ? Que de pareilles inexactitudes — pour employer un euphémisme — aient été publiées avant les réponses de MM. Monet, Mignault et Hamel, cela pouvait peut-être se faire avec un certain degré de bonne foi ; mais aujourd’hui, de telles accusations ne peuvent que déshonorer ceux qui se les permettent.

« Nous nous devons à nous-mêmes, nous devons à nos ancêtres, nous devons à toute la race française d’être fiers de ce que nous sommes et de garder intact le fond de notre caractère ethnique »… (page 354.) Il ne faut pas oublier, non plus, que suivant un savant philosophe français[1] « les influences morales et sociales sont supérieures aux influences ethniques, » et que l’enseignement bilingue n’offre aucun danger sérieux quand il est donné par des patriotes éclairés, comme sont les professeurs de notre enseignement primaire.

« Nous n’aurons pas deux castes parmi nous, la caste des lettrés gardant l’esprit français et la caste des primaires à mentalité commerciale… L’effort du maître doit tendre à rendre l’élève capable de juger sainement, d’avoir un goût sûr, de critiquer avec discernement, d’admirer ce qui est admirable, de rire de ce qui est ridicule. Pour cela, le procédé qui a fait ses preuves, c’est d’étudier longuement, patiemment, passionnément, la langue dont nous nous servons pour exprimer nos pensées. »

C’est une belle découverte, ça, Père, elle fait penser à la « Femme Savante » de Molière disant :

  1. A. Fouillée, cité par l’abbé F. Mourret dans « L’Église et le Monde Barbare » (p. 276)