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même retrancher la sixième année, mais nous la conserverons, afin de nous mettre dans les conditions les plus défavorables possible.

Soixante-sept (67) écoles des huit congrégations enseignantes nous ont donné les renseignements demandés. Dans ce nombre sont compris tous les principaux collèges commerciaux de la Province. Les quelques écoles qui n’ont pas répondu, n’ont probablement pas la sixième année. Dans ces soixante-sept (67) institutions susceptibles de dépeupler les campagnes, deux mille soixante-treize (2073) élèves viennent des centres ruraux : ce chiffre comprend deux cent quarante et un (241) fils de cultivateur, dont cent quatre-vingt huit (188) appartiennent à des familles de plus de trois garçons. Il est grand, il est noble, il est beau de cultiver : encore pour ce faire faut-il un lopin. Aux prix où sont les terres dans la Province, il est difficile qu’un cultivateur qui a plus de trois garçons puisse les établir tous sur des fermes ; il sera même très chanceux s’il peut en établir trois ; les autres devront, donc prendre le chemin de la ville et tâcher d’y gagner leur vie, avec leurs bras ou avec leur tête. Faut-il blâmer ceux qui choisissent cette dernière façon ? Mais, dira-t-on, il y a dans l’Abitibi et ailleurs, à des prix très abordables, des terres qui attendent des bras. Oui, mais il y a les moustiques et les autres désagréments. Le colon est le fils du colon, comme le cultivateur est le fils du cultivateur : c’est la règle que les exceptions ne servent qu’à confirmer. Le vieux Chapedelaine de Hémon est, de l’aveu de tous, le type du colon. Une terre n’est pas si tôt ouverte, qu’il ne se trouve plus dans son élément ; on dirait que la civilisation lui fait peur ; ce qu’il lui faut, ce sont des arbres à coucher, des souches à déraciner, des chemins à ouvrir, en un mot de la terre à faire ; il a en quelque sorte la colonisation dans les veines. C’est bien difficile de demander aux fils des cultivateurs de nos riches campagnes, habitués à un confort presque égal à celui dont on peut jouir en ville, de s’en aller ouvrir de nouvelles terres.

Il faudrait pour cela que nos jeunes « habitants » vissent aussi clairement que nos colonisateurs d’occasion, toute la grandeur, la noblesse, la beauté de l’agriculture ; nul doute qu’alors, ils voudraient eux aussi faire passer leur enthousiasme dans l’âme de leurs compatriotes : l’apostolat y gagnerait beaucoup, mais la colonisation ?

Il n’y a donc actuellement, dans le cours appelé commercial, qu’environ cinquante-trois (53) fils de cultivateurs que l’on pourrait appeler des déserteurs du sol. Encore de ce nombre faudrait-il ôter les infirmes, car il y en a ; quelques directeurs nous ont donné ce détail sans que nous le leur demandions, et ceux qu’une débilité trop grande met dans l’impossibilité de servir la noble cause de la terre autrement que par des déclamations agricoles.

Sur neuf cent quatre-vingt-dix-huit (998) diplômés sortis depuis cinq ans des maisons dont nous avons reçu les statistiques, cent soixante-quatre