Page:Allumez vos lampes, s'il vous plaît, 1921.djvu/53

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 53 —

« Apprenez l’anglais, apprenez-le tandis que vous êtes jeunes et apprenez-le bien, » a déclaré l’hon. M. Tasehereau, hier, à l’Académie Commerciale des Frères des Écoles Chrétiennes de Québec. En même temps, le premier ministre a fait bonne justice des préjugés de ceux qui voient dans l’enseignement hâtif de l’anglais à nos enfants un grave danger pour le développement de notre caractère national et, l’avenir de la race canadienne-française. « Je ne vois pas, dit-il, en quoi la connaissance de la langue de la majorité soit une renonciation à ces choses, grandes et petites, qui forment notre patrimoine et constituent le caractère distinctif qui nous est si cher. Je ne vois pas comment l’étude de l’anglais à un âge où les organes sont assez plastiques pour acquérir une bonne prononciation, peut empêcher la connaissance de la langue que nous avons apprise sur les genoux de nos mères, que nous parlons exclusivement au foyer et dans laquelle nous formons nos pensées et nos idées ».

Du reste, comme l’explique encore l’hon. M. Tasehereau, répondant ainsi aux insinuations de certains journaux où l’on déclare que cet enseignement de l’anglais a pour objet de supplanter le français dans nos écoles, il ne s’agit aucunement d’enlever à notre idiome maternel la place qu’il tient dans notre vie nationale, mais plutôt de fournir aux nôtres l’occasion d’apprendre l’anglais comme langue secondaire, et de l’apprendre assez bien pour être capable de la parler convenablement. Consacrer chaque jour un temps suffisant pour familiariser les élèves avec le vocabulaire et la prononciation de l’anglais, voilà tout ce que l’on demande. Ainsi que l’a fait remarquer un instituteur de Québec, et il est facile de le comprendre, « ces instants sont nécessaires pour la pureté de l’accent, la mémoire des mots et surtout pour enlever à l’enfant la gêne qu’il éprouve de parler anglais quand il ne s’y est pas exercé dès ses jeunes années. »

Sensibles au reproche que nous leur faisons souvent de ne pouvoir s’exprimer en notre langue, alors que nous trouvons le moyen de parler leur propre langue, nos concitoyens anglo-saxons ont résolu de modifier leurs programmes scolaires de manière à rendre plus pratique l’enseignement, du français. Ils ont compris qu’ils attendaient trop tard pour apprendre notre langue, ce qui les empêchait d’obtenir des résultats satisfaisants. Les fruits de cette réforme commencent déjà à apparaître, et c’est un fait significatif que, aux derniers examens des écoles de Westmount, on a constaté que les élèves avaient progressé considérablement dans la connaissance du français. Il convient donc que, de notre côté, nous ne négligions rien pour accroître notre science de la langue anglaise. Au simple point de vue des relations entre les citoyens de la province de Québec, ce développement parallèle et simultané du parler français dans les écoles anglaises, et du parler anglais dans nos propres institutions, devra avoir les plus heureuses conséquences.