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dans le siècle. Il n’est pas nécessaire d’être en rapport avec M. Asselin pour apprendre plus d’une petite intrigue de la politique et de la finance. Les supérieurs des Frères par leurs relations obligées avec les diverses autorités du pays et les chefs de maisons commerciales et industrielles, en apprennent plus que ne le suppose M. Asselin ; et, comme lui, ils savent à quoi s’en tenir « sur les avantages respectifs de l’anglais et du français en affaires pour notre race à l’heure actuelle. » Quant à ce qu’on peut apprendre du siècle par les livres, un fait montrera que les Frères ne sont pas les plus lents à se renseigner. Un libraire de Montréal faisait dernièrement la remarque que tous les livres nouveaux étaient enlevés dès leur apparition par les professeurs de l’enseignement primaire ou commercial.

Oui, les Frères, fuyant la routine, vivent dans le siècle du progrès.

M. Asselin a encore l’expérience des poussées. On ne s’étonne pas qu’il reconnaisse celle qui est bovine. Ce qui surprend, c’est qu’il la voie dans l’espèce humaine et que, par fantaisie, il brûle du désir de la contenir. M. Asselin, qui ne vit pas de l’air du temps, sait bien que les chefs de famille, qu’il traite de troupeau maigre, ont le droit et le devoir d’assurer la subsistance à leurs enfants. Ici, il ne peut être question d’attendre. Si la poussée est si forte vers les collèges des Frères, c’est que les parents y trouvent un moyen de fournir largement à leurs enfants le pain du corps et de l’esprit. L’idéal poursuivi dans ces écoles est utilitaire, mais la direction donnée apprend avant tout à penser, à développer l’initiative, à vouloir, tout aussi bien sinon mieux qu’ailleurs. Cela ne peut s’opérer en faisant de l’anglais « un instrument pour la formation de tout petits enfants d’origine française. »

Il n’y a pas de sots métiers ; mais « les laveurs de crachoirs des bureaux anglais » et autres, n’ont pas dû faire une longue scolarité. Que M. Asselin observe ; il verra que les diplômés des écoles des Frères peuvent être autre chose que des laveurs sanitaires ou « des machines à additionner à $18 par semaine. » On n’arrive pas au sommet de l’échelle sans passer par les échelons intermédiaires. Plusieurs de nos compatriotes, aujourd’hui à la tête d’importantes entreprises industrielles ou commerciales, avaient une occupation analogue au début de leur carrière, ce qui ne les a pas empêchés d’arriver au succès. Du reste, ces « machines à additionner » valent bien les moulins à paroles, les machines à copier, griffonnant ou débitant des thèses embrouillées, en vue d’une maigre pâture. Mais, silence, respect ! Tout cela se fait avec abnégation pour défendre la veuve et l’orphelin.

En terminant, M. Asselin pose à la Mirabeau. Il déclame qu’il « faut arracher hardiment à ces demi-illettrés la direction de la race. » Tout le monde croyait que la direction de la race en matière d’enseignement, était aux mains du Conseil de l’Instruction publique. Les Frères lui