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sont un véritable charabia ? Et cela n’est pas attribuable aux programmes des collèges classiques, pas plus que de pareilles faiblesses puissent être attribuées aux programmes des collèges commerciaux. Quand on écoute complaisamment, on entend dire tout ce que l’on veut, et ça ne prouve pas grand’chose.

Il y a trop de collèges commerciaux, chante-t-on depuis quelque temps. L’ordre en est donné, et les chefs d’orchestre battent en mesure. Ces institutions sont cause que la terre est désertée par ses fils les mieux doués. On ne peut certainement pas dire cela des collèges commerciaux de ville. On ne fait pas un cultivateur avec un garçon de ville, c’est chose d’expérience. Les collèges commerciaux de campagne sont fréquentés pour les neuf dixièmes, au moins, soit par des fils de citadins ou de marchands de campagne ou d’industriels, soit par des fils de journaliers résidant dans la localité. On n’en voudra pas aux marchands et aux industriels de vouloir faire donner une instruction commerciale à leurs fils en vue de préparer leur avenir. Quant aux fils de journaliers, il n’est pas criminel, je suppose, de vouloir en faire autre chose que des porteurs d’eau. Pour ce qui est des fils de cultivateurs, ils viennent parce que leurs parents, ayant le plus souvent de nombreux garçons, ne peuvent les établir tous sur des terres.

Et voilà comment ces fils de cultivateurs deviennent souvent des commerçants ou des industriels de marque, grâce au collège commercial sans lequel ils seraient scieurs de long. Si vraiment il y a trop de collèges commerciaux, pourquoi donc, sur vingt et un collèges classiques y en a-t-il treize qui donnent un cours commercial et dont neuf ont plus d’élèves en ce dernier cours que dans le cours classique ? Je propose qu’il soit fait un recensement des fils de cultivateurs dans les collèges commerciaux et dans les autres collèges : on verra qui possède les drains les plus considérables.

Passons au grand crime des Frères enseignants. Jusqu’ici on avait pu croire que les écoles primaires étaient pour quelque chose dans la conservation de la langue française. Nenni ! détrompez-vous, bonnes gens : par la faute des Frères, la langue française n’a pas toute sa pureté en Amérique ! Cette imperfection n’est pas due au voisinage, à l’ambiance où nous vivons ; au catalogue, ne donnant que le terme anglais ; à l’annonce, trop souvent véhicule d’anglicismes ; au contremaître, anglais le plus souvent, et ne sachant que le mot anglais ; à une foule d’autres causes, à l’inévitable même ; non, la faute en est aux Frères enseignants ! Ce serait drôle, si ce n’était pas dégoûtant d’entendre dire cela par ceux même qui devraient le mieux comprendre et le plus apprécier les sacrifices que font ces religieux éducateurs, et l’œuvre d’assainissement de toutes sortes, accomplie par eux.