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que Mgr Ross a publiés dans le « Devoir » de la semaine dernière ; je vous saurais gré de les publier.

J’abonde dans le sens de Mgr Ross sur la nécessité d’alléger le programme de nos écoles primaires élémentaires, mais je ne puis aller plus loin. À mon avis, l’importance qu’on attache à une matière ne se mesure pas au fait qu’elle est inscrite au programme, mais à l’étendue qu’elle a au programme, mais au nombre d’heures qu’on lui consacre par semaine, mais à la méthode que l’on préconise pour l’enseigner. Je suppose qu’à Montréal, centre bilingue, l’on emploie chaque semaine une heure et demie en 2e, 3e et 4e années à l’étude orale et intuitive de la langue seconde, pensez-vous que la langue seconde aurait le pas sur la langue première ? Pensez-vous qu’il en résulterait de sérieux inconvénients, surtout si la langue première est dix heures par semaine l’objet d’une étude méthodique et suivie ? Je ne le crois pas.

Que le Conseil de l’Instruction Publique détermine explicitement, pour les centres bilingues, de quelle façon l’on enseignera la langue seconde, qu’il indique minutieusement quel temps on lui consacrera, et la question sera réglée. Le programme des écoles anglaises spécifie quel temps l’on doit, chaque semaine, attribuer aux diverses matières. Ce ne sera pas de l’anglomanie d’imiter en cela… les Anglais.

Je ne crois pas que la formation française d’un enfant de sept ans soit compromise par vingt minutes d’anglais, tous les jours, si on se sert pour cela du procédé direct et oral, parce qu’alors l’on ne fait nullement appel au vocabulaire français de l’enfant, mais au jeu de ses facultés par l’intermédiaire des sens. Je connais des petits Italiens de sept ans, qui pensent en italien, en français et en anglais, parce que, à la maison et sur la rue, ils ont acquis intuitivement le mécanisme de ces trois langues. Cela s’est fait sans effort et sans heurt.

Je ne demande pas à l’école primaire d’enseigner à nos enfants de la grammaire anglaise, à coups de thèmes et de versions, mais seulement de les initier au mécanisme vivant qui fait penser en anglais. Cela suppose des professeurs qui parlent parfaitement la langue anglaise ! Et, à ce compte, une heure et demie d’anglais par semaine, pendant les six années du cours primaire, vaudrait mieux que tout ce qu’on nous a donné dans le passé ; et cela ne nuirait pas plus à la formation générale des enfants que si l’on employait le même temps à leur enseigner la musique vocale.

J’irai même jusqu’à dire que si l’on retranchait complètement l’anglais du programme primaire, le français de nos enfants serait tout aussi pauvre et tout aussi farci d’anglicismes. Le français de la famille est misérable : celui de l’école un tant soit peu moins mauvais : celui de la rue, pitoyable. L’enfant pousse dans un milieu vicié et son langage s’en ressent… Voilà tout. Mais ! nos gens instruits, les rédacteurs de