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DISCOURS PRÉLIMINAIRES.

dans le sein de la terre ceux que leur mère a été forcée de laisser nus, après les avoir mis au monde. On ne craint plus la vengeance des lois : on se dit que la mort, leur dernier châtiment, ne pourrait punir le misérable qu’en mettant un terme à sa misère, et la société retombe dans cet état de barbarie où l’ambition n’a de barrières que dans les ambitions rivales ; où la force règne toute seule, et où le droit de l’un n’est plus protégé par la conscience de l’autre.

Laissez la religion se retirer d’une société, et un trouble indéfinissable s’empare des cœurs. Chacun, tourmenté d’une ardeur déréglée, s’empresse dès l’aurore à creuser la terre comme pour y trouver un trésor, et le soir on les voit tous verser des pleurs auprès du vide qu’ils ont creusé, et où ils n’ont trouvé qu’un sable stérile, la pierre du rocher ou la source bourbeuse. L’espérance sans cesse trompée fuit comme l’ombre qui décline toujours ; l’espace illimité qu’on cherche, on s’imaginait l’avoir devant soi, mais ce n’était qu’une vaine illusion produite par la vapeur qui voilait l’horizon et en cachait les bornes ; la brume se dissipe, les objets se rapprochent, l’horizon se rapetisse, et l’immensité s’évanouit.

Je ne sais quel poignant besoin d’affections tour-