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DISCOURS PRÉLIMINAIRE.

indestructibles, mais en les alimentant, au contraire, de manière à ce qu’au lieu de se cacher, elles se montrent ; au lieu de nuire, elles servent ; au lieu de résister, elles coopèrent ; au lieu de descendre, elles s’élèvent. C’est sur le cœur qu’il faut agir ; il importe de le toucher, de l’exalter, de lui rendre la vie, d’éveiller ses flammes pour un but légitime. Égaré, il bouleverse la société ; satisfait et bien réglé, il brûle pour un bonheur qui fait partie de la prospérité commune.

Il serait dur de voir des législateurs mettre en oubli la haute destination de l’homme qui a été créé pour une activité sans bornes, parce que sa fin dernière est un objet infini. Un philosophe ancien a défini l’ame une nature sans repos : un peuple n’est donc qu’un ensemble de natures sans repos, c’est-à-dire que leur repos est dans l’action même, et que la tranquillité de l’État ne peut être due qu’à des lois qui ont le secret d’employer et de fatiguer sans relâche ces forces incessamment agissantes.

Ce qu’on appelle une révolution dans un État est aux yeux d’un philosophe un déploiement unanime de passions long-temps privées d’exercice et d’objet :