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DISCOURS PRÉLIMINAIRE.

moral ne peut différer de l’astre d’ici-bas, qui est à la fois lumière et flamme.

Cette domination de la raison nous a conduits à prendre les passions en dédain. On a vu paraître l’orgueil de l’esprit et la sécheresse du cœur ; on a flétri des noms de sensualisme égoïste et de niaise sentimentalité le principe des plus nobles mouvements de l’âme, le foyer des grandes et généreuses passions, la source des élans de cet enthousiasme qui pousse au sacrifice, fait aimer la souffrance et la mort, et entraine l’homme vers une perfection qu’il adore sans la connaître. On a cessé ainsi d’étudier les passions que l’on méprisait : enseignement, éducation, littérature, théâtre, mœurs publiques, tout a subi chez nous l’influence d’une doctrine inventée par un froid métaphysicien qui, ne trouvant pas sans doute l’amour dans son cœur, l’avait déclaré étranger à celui de tous les hommes et l’avait exilé de la philosophie et du ciel. Partout l’esprit ne s’est plus adressé qu’à l’esprit ; et par esprit, j’entends aussi bien l’imagination que la raison. L’imagination est froide ; elle devine quelquefois le cœur, mais elle ne le remplace pas ; cette dernière faculté a paru inspirer la plupart des productions de la littérature contemporaine. Cepen-