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yeux ; le présent et l’avenir sont pour nous une épaisse nuit. Il n’y a que certains traits d’une sagesse achevée qui, dans le passé, forcent notre admiration. Il ne nous est permis de juger le tableau que lorsqu’après avoir reçu quelques touches de chaque siècle, il obtient le dernier fini, avant que la lumière de nos yeux soit éteinte. Les effroyables guerres, au milieu desquelles est né ce siècle, tiendront leur place dans l’ordre d’évènements que Dieu aperçoit tout disposés dans sa providence. Sans doute, au milieu des émotions de la guerre, les cœurs ne sont guères préparés à recevoir la foi : ils y adorent, dans la variété imprévue des évènements, je ne sais quelle force aveugle et capricieuse, qu’on nomme fatalité, destinée ou fortune. Là, il est trop de bruit pour étourdir l’homme, trop de gloire pour l’aveugler. Les vainqueurs sont trop fiers, les vaincus trop humiliés ; et la religion ne sait où se placer en nous, entre cette ivresse du triomphe et cet accablement de la défaite. Mais, lorsque ces grands évènements ont fait place au calme et au silence, le sentiment confus d’une suprême puissance remue les cœurs : Dieu se rend visible à la grandeur de certains débris. La guerre est terminée, mais il y a tant de morts à ensevelir, qu’il demeure partout un immense besoin de