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livre vii, chap. i.

Le peuple est entré, par la révolution de juillet, dans les destinées que son remuant courage brûlait d’atteindre. Quel a été le but proposé, depuis 1830, à cette ardeur ennemie de tout repos ? Le gouvernement nouveau pensait-il que le peuple allait se coucher dans sa liberté et dormir sa victoire ? Qu’on y prenne garde ! il a toujours été occupé. En guerre avec son gouvernement, l’étranger ou lui-même, il n’a jamais cessé de donner un grand labeur aux muses qui veulent écrire son histoire. Aujourd’hui, il se désaccoutumerait de l’inquiétude, perdrait l’instinct des combats, se défendrait contre l’appât de la nouveauté, et ne pousserait plus de téméraires soupirs vers tout ce qui est lointain, périlleux, inconnu ! Et cela au lendemain d’une révolution qui lui a permis de tendre toutes ses forces, de jouer à la démolition d’une monarchie, d’essuyer ses pieds couverts de boue et de sang sur l’or et le velours du trône ; non, les troubles civils ont été inévitables, dès que le besoin d’agir, qui dévore la nation, n’a plus su où se prendre. Faute de mieux, nous nous sommes entre-déchirés, semblables à ces malheureux naufragés qui, pressés par l’impitoyable faim, finissent par se regarder d’un œil farouche, et songeant à vivre les uns aux dépens des autres,