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a plus de force et d’étendue ; car la liberté loin d’avoir pour effet d’isoler les hommes, tend sans cesse à leur faire mettre en commun le plus de sentiments possible. La paix règne dans l’État quand il n’est mu tout entier que par une même espérance. Voilà pourquoi il importe si fort qu’une nation libre ait toujours un but. L’émulation adoucit les haines, éteint les factions, consolide les lois et le gouvernement. Une nation occupée se possède et jouit d’elle-même. Donnez un but déterminé à un pays libre, et vous êtes certain d’y faire éclore l’amour des institutions nationales.

Pourquoi les Anglais ont-ils plus de patriotisme que nous ? parce qu’ils poursuivent de concert un grand but qui, sans cesse atteint, recule sans cesse : je veux dire l’empire du commerce. Cette destinée nationale se révèle dans la constitution, les lois, les mœurs, les coutumes, les préjuges ; tout va d’une pièce de ce côté.

Comment Napoléon, debout, l’épée à la main, sur les restes épars d’une vieille société, a-t-il éteint les dissensions, dissipé les partis, ressuscité l’ordre, évoqué un esprit nouveau ? c’est qu’il avait proposé une fortune gigantesque à nos courages : la domination universelle ; et tous, alléchés par un rêve si magnifique, d’étouffer