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de la démocratie nouvelle.

Cependant les seigneurs distribuent à leur tour des terres à de moindres nobles, et se font des vassaux[1]. Ceux-ci imitent cet exemple ; la féodalité couvre la France d’un seul filet ; et aux deux bouts de cette chaîne de dominations qui se suivent et se poussent les unes les autres, se trouvent le roi et le peuple, également faibles et opprimés.

Charlemagne paraît, et opère une réforme que n’achèveront pas ses successeurs : je vois encore dans la nuit de ces temps reculés la trace lumineuse que son règne a laissée, et qui divise les ténèbres d’avec quoi ? d’autres ténèbres. La nation recouvre un moment ses anciens droits ; les assemblées du Champ de Mars revivent. L’insolence des grands est contenue. Mais le grand homme expire ; la liberté de la nation s’éteint avec lui, et tout rentre dans l’ombre et le chaos.

Plusieurs siècles s’écoulent ; enfin le vaste réseau féodal se rompt par un bout. La royauté, long-temps abaissée, a vu venir son jour. Louis le Gros vend aux habitants de ses domaines le droit de se défendre contre les brigandages des seigneurs ; les communes s’émancipent ; les justices seigneuriales s’écroulent ; Louis XI exerce le droit de citer les grands au tribunal de la cou-

  1. C’est ce qu’on nommait arrière-fiefs.