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livre i, chap. ii.

plus en holocauste à sa douleur, mais retournera avec courage sur ses pas, résistera au vertige qui l’entraîne dans l’abîme, et saura reconquérir le bonheur et la vérité.

Quant à notre littérature, j’en condamne, autant que qui que ce soit, les déplorables hardiesses contre la morale. Mais il n’est pas de nos jours un mouvement surpris par un homme de lettres au fond de son ame, pas un souvenir emprunté à ses passions, même à ses vices, pas un de ces caprices qui s’introduisent dans l’imagination la mieux ordonnée, et, à plus forte raison, en un cerveau allumé par le travail et enhardi par la liberté, qui ne trouve une expression et ne révèle les bassesses du cœur, l’insolence des pensées, les ouragans de l’imagination. Que si, dans les temps dont on nous oppose la littérature sage, contenue, ornée de si belles proportions, tout ce qu’il y avait de sentiments déshonnêtes dans les cœurs, de vœux déréglés dans les esprits, de révoltes contre la religion dans les entendements, de pentes à la licence et au libertinage dans les caractères, avit obtenu la liberté de se produire, je n’oserais assurer que ces muses environnées de tant d’hommages, une fois délivrées des brides de la censure, eussent été beaucoup plus chastes et plus chrétiennes que les nôtres[1].

  1. Je n’en voudrais pour preuve que la licence à laquelle