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livre i, chap. ii.

qui, ayant convoqué les États de son royaume en 1484, put lire dans les doléances des trois ordres ce crayon effrayant des calamités publiques :

« Le peuple, opprimé tout à la fois par les gens de guerre qu’il paie pour en être protégé, et par les officiers chargés de lever les impôts, est chassé de ses maisons dévastées et erre sans subsistance dans les forêts. La plupart des laboureurs, à qui on a saisi jusqu’à leurs chevaux, attèlent leurs femmes et leurs enfants à la charrue, et n’osent même labourer que la nuit, de peur d’être jetés dans les prisons ; ils se cachent pendant le jour ! D’autres, réduits au désespoir, fuient chez l’étranger, après avoir égorgé leurs familles qu’ils n’étaient plus en état de nourrir. »

Si nous poussons jusqu’aux règnes de Charles IX et Henri III, le repos, la moralité et le bonheur que nous cherchons nous fuient encore. Nous tombons au milieu du sang que font couler les guerres religieuses. Les ressorts du gouvernement sont brisés. On fait trafic des charges, des honneurs, de la justice, des sacrements de l’Église. Catherine de Médicis vend l’honneur des femmes de sa cour, dans l’intérêt de sa politique. Le légat du pape salue du nom d’Église militante ce corps armé de religieux qui, la hallebarde en