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Ajoutons que les rangs de la classe moyenne s’ouvriront à l’ancienne aristocratie, qui se rajeunira en oubliant son origine. Un serment à la dynastie de juillet, et le dévouement à la gloire et au bonheur du pays, seront les seuls titres d’admission dans les classes régnantes. Il n’y aura plus de distinction entre les ordres. Le tiers-état est la nation. Le mot de Sièyes s’accomplira.

Bientôt, nous en concevons l’espérance, nous ne verrons plus, en France, ni vainqueurs ni vaincus : il ne s’y trouvera plus que des citoyens. On nous ferait donc une sensible injure en nous supposant le désir de voir prononcer contre l’ancienne aristocratie la même exclusion dont elle frappait autrefois la bourgeoisie.

Cet ouvrage est conçu tout entier dans un esprit de conciliation nationale. Nous ne venons pas planter avec une arrogance intolérante le drapeau des classes moyennes, nous ne voulons pas ressembler à l’insouciant Germain, qui, selon la vieille ballade, passait en sifflant, le soir de son triomphe, sur le champ de bataille : nous savons nous incliner avec respect devant les augustes restes des ancêtres de la patrie.

Ce n’est pas nous qui méconnaîtrons les brillantes et généreuses qualités qui ont brillé dans la noblesse française. Eh ! quoi de plus digne d’admiration que cette joie dans le courage, qui la faisait rire à la mort dans les combats, ce soudain mépris d’une vie qui, tout à l’heure, semblait donnée au plaisir, ces incroyables égards envers un ennemi malheureux, cette scrupuleuse fidélité à la parole engagée, ce respect payé au sang qu’on portait dans ses veines, et qui ne vous permettait pas de dégénérer ; enfin ce culte de l’honneur, mot qui fait sentir un si grand nombre de choses inexprimables, sous lequel se représentent la bravoure dans