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des barricades au bagne

Mon bataillon est désigné pour la colonne qui doit opérer sur l’aile droite, avec Bergeret et Flourens ; deux autres bataillons de la 5e légion font également partie de cette colonne. À celles opérant à l’aile gauche et au centre, placées sous le commandement de Duval et d’Eudes, ont été détachés trois autres bataillons. La réserve se compose du 160e, du 118e et du 151e, mais on a omis de donner des ordres pour les rassembler : cette préoccupation étant considérée comme inutile, tellement la confiance est grande en la réussite !

Le 3, vers minuit, chaque membre du Comité de légion venait rendre compte de la mission dont il avait été chargé et de l’arrivée des bataillons du Ve à leur point de concentration. On décidait ensuite que je me tiendrais en permanence à la mairie et qu’un des nôtres serait délégué auprès de chacun des bataillons engagés ; puis, comme nous étions exténués de fatigue, chacun s’arrangea de son mieux pour le restant de la nuit, et notre salle se transforma en dortoir.

J’étais préoccupé, au-delà de toute expression, par ce que j’avais vu durant cette si pénible journée, et le sommeil s’obstina à fuir mes paupières. Dès que le jour pointa je me levai et fis appeler le citoyen Breton, qui s’était mis à la disposition du Comité.

— Citoyen, lui dis-je, vous allez vous rendre près de Duval qui, à l’heure actuelle, doit se trouver non loin du plateau de Châtillon, et vous le prierez de vous communiquer ses impressions ; vous observerez, d’autre part, l’attitude des hommes, l’ordre de bataille et, après avoir salué les commandants des bataillons du Ve, vous reviendrez, non sans avoir visité le fort de Vanves. Voici votre sauf-conduit.

— Citoyen Allemane, je monte à cheval et, avant onze heures, je rapporterai les renseignements que vous désirez.

Un ex-franc-tireur vosgien fut aussi envoyé auprès de Bergeret ou de Flourens ; puis, à leur tour, les collègues désignés partirent rejoindre leurs bataillons respectifs.

Les heures se passent ; aucun des deux cavaliers n’est revenu. L’inquiétude devient alors insupportable et, malgré la décision qui me cloue à la mairie, je décide