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mémoires d’un communard

la face contre le bois et les deux bras en encadrant l’extrémité. Cela fait, on lui attache les pieds et le torse après qu’on a rabattu son pantalon et relevé sa chemise par-dessus sa tête.

— Exécutez ! commande la brûle galonnée.

Le correcteur lève le martinet.

Un ! dit le chiourme, frappant le sol du pied.

L’instrument de torture tourbillonne et s’abat sur le corps du patient.

Un sourd gémissement se fait entendre et, sous la souffrance endurée, le corps du supplicié se raidit. L’épiderme couvrant les reins se boursoufle.

Deux !

Les sept branches du martinet viennent s’abattre à la môme place et le sang gicle.

Un cri rauque s’échappe de la gorge du patient, dont le corps, malgré les liens qui le maîtrisent, a des soubresauts.

Trois ! continue le chiourme, impassible.

Les torons des lanières entament la peau et la chair du malheureux, qui pousse des cris épouvantables.

Quatre ! Cela devient affreux ; le sang du patient coule en abondance, et, les yeux hagards, nous regardons cette abomination, nous percevons ces hurlements, la gorge serrée, le cœur oppressé à en mourir.

Mon compagnon de droite, le citoyen Quetin, s’évanouit, et je dois le soutenir.

— Ne bougez pas, charognes ! glapit un surveillant.

— Face en tête ! salauds, ou gare ! nous crie un deuxième chiourme.

On se raidit contre le dégoût.

Cinq !

Le fouet s’abat plus rudement encore, et les hurlements deviennent fous, se continuent sans arrêt.

Mon voisin de gauche chancelle-à son tour ; on le soutient comme Quetin, pendant que la séance sanglante continue, au milieu des jurons des surveillants.

Six ! sept ! huit ! neuf ! dix !

Le martinet poursuit son œuvre, coupant, hachant la chair du patient. Des lambeaux de peau et de chair se mêlent au sang, qui jaillit jusque sur le correcteur.