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mémoires d’un communard

Et je me demandais, évoquant les insanités écrites par de prétendus sociologues, quelles étaient les « véritables femelles », de ces déshéritées de la vie (chair à travail ou à plaisir, devenues chair à prison) ou des belles dames du monde où fréquentait M. Alexandre Dumas fils ?

Si pitié est signe de noblesse, me disais-je, la réponse est nette, catégorique.

Le voyage se poursuivit sans incident méritant d’être signalé, si ce n’est un long arrêt avant d’atteindre le point terminus, arrêt qui me valut la remise des menottes aux poignets et la fermeture du guichet.

Le train stoppe à nouveau et j’entends l’ordre donné aux femmes de descendre : nous sommes, cette fois, à Toulon !…

A nouveau, un long temps s’écoule ; aucun bruit ne se fait autour de moi, ce qui m’indique que le chef de convoi s’est tout d’abord occupé des femmes et que mon tour ne viendra que lorsque ces dernières, qui m’ont crié d’avoir bon courage, auront été incarcérées. Quelque désagréable que soit ma prison, je n’éprouve aucune hâte d’en sortir : assez tôt je verrai le bagne !

On monte dans le wagon, on ouvre ma case et on m’enlève les entraves ; mais, jambes et pieds sont comme ankylosés, et on doit me soutenir à la descente. Tant bien que mal, je m’achemine vers le bagne, tel un condamné à mort vers la guillotine.

CHAPITRE V
premières impressions. — le numéro 24.328. — le rama. — le ferrement. — la bastonnade. — mœurs de bagne. — la casemate.

Je me sens impuissant à dépeindre l’angoisse qui m’étreignit au moment où, pénétrant dans l’Arsenal,