Page:Allemane - Mémoires d’un communard.djvu/131

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
112
mémoires d’un communard

ou disséminés un peu partout. Si la Commune ne savait agir, en revanche la réaction se remuait et prêtait à l’envahisseur un concours des plus actifs, l’éclairait, jetait la panique, frappait dans le dos les défenseurs des barricades à l’aide des fusils à vent dont elle avait été munie.

Les millions de la Banque de France faisaient vraiment merveille contre les communards !

Cependant, la bataille allait s’engager, rude, sanglante ; mais rares — ô combien ! — étaient, parmi les nôtres, ceux qui prévoyaient les horribles exécutions sommaires, les sauvages tueries de prisonniers, d’hommes de tout âge, de femmes et d’enfants.

Si cette épouvantable vision eût hanté les cerveaux de tous ceux qui tenaient une arme, jamais Versailles n’eût, pu vaincre Paris. Ces braves gens ne pouvaient sonder ce que l’âme bourgeoise renferme d’égoïsme et de froide cruauté.

La grosse voix du canon, le bruit strident des mitrailleuses et le crépitement de la fusillade eussent dù faire comprendre, même aux plus sourds, que la partie suprême était engagée entre la justice sociale et les privilèges, entre l’Avenir et le Passé.

Le défaut d’un plan général de défense devait terriblement favoriser l’envahisseur ; de ce fait, chacun en agissait à sa guise et cela explique le peu de résistance rencontrée au quinzième, au septième et au sixième. Dès les premières heures du lundi 22 mai, l’ennemi attaquait la rue de Rennes et, de la gare, menaçait le boulevard du Montparnasse.

La Cécilia, ses corps francs et le 59e bataillon avaient abandonné la porte de Vaugirard et gagné l’Hôtel de Ville durant la nuit. Au matin, la Commune envoya La Cécilia vers Montmartre, et Lisbonne, placé sous ses ordres, vint au Panthéon avec une partie des corps francs : turcos de la Commune et chasseurs fédérés.

Une compagnie des « Enfants du Père Duchêne » accompagnait ces troupes mais, ainsi que d’autres bataillons de la garde nationale, ladite compagnie devait nous être d’un bien maigre secours.

Après un échange de vues, Lisbonne envoyait les commandants Lambert et Francfort renforcer le 151e,