plète de sommeil, avaient été telles qu’elles avaient fini par provoquer un état de prostration ayant les apparences de la mort. On me transporta à l’ambulance du docteur Ladray de la Charrière, installée à l’école des sourds-et-muets, rue Saint-Jacques. Le savant praticien parvint à me rappeler à la vie à l’aide de l’électricité et, quelques jours après, je pouvais reprendre mon poste de combat.
Cependant, quelque courte qu’eût été mon absence, les adversaires que je comptais à la mairie et à la légion en avaient su profiter. Basile s’était mis à l’œuvre et, en attendant mieux, la calomnie avait fait impunément son chemin.
Peu habitué à ces procédés misérables, j’en éprouvai un vrai chagrin ; je ne pouvais, en ma juvénile loyauté, supposer qu’il y eût des gens aussi lâches. Hélas, ce n’était pourtant là que jeux d’enfants : combien, depuis cette époque lointaine, j’ai dû essuyer la bave des calomniateurs ! Même la confusion du triste sire qui s’était ingénié à me salir, un sieur Dufour — créature de Régère — ne put parvenir à calmer mon indignation, à cicatriser la blessure faite par le venin. O naïveté !
A peu près rétabli dès le 14 mai, le 15 je me rendais à Neuilly, où se trouvait un bataillon de notre légion, J’y vis Dombrowsky ; il était accompagné d’un grand diable d’officier qui le faisait paraître encore plus petit. Les balles sifflaient sans arrêt ; Dombrowsky, très calme, marchait droit, souriait et disait à ceux qui, instinctivement, saluaient le plomb homicide :