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L’ÂME DES MAINS

l’ignorance et refusent de l’alléger en la délivrant de quelques mystères. Et la pauvre bible, malgré l’âge, retient encore ses merveilles dans ses pages gondolées et rognées par la nervosité des hommes qui la feuillettent toujours sans y rien comprendre. Comme une large et profonde blessure, elle est ouverte au chapitre de l’Apocalypse. Elle a la tristesse sereine des grands martyrs chrétiens.

Walther étudie avec rage. La tête serrée dans les mains se penche sur un volume dont le texte se dissimule dans les enluminures des pages. Un disciple de Paracelse y a transcrit avec habileté et prudence les grands enseignements du maître rosicrucien.

Sur le dossier de son fauteuil, un hibou contemple le silence de la nuit. Ses yeux jaunes lancent des regards verts. La phosphorescence de son observation un peu vague est mêlée de sagesse et d’ironie. Peut-être voit-il deux mondes, car l’ironie est consacrée aux aveugles qui souffrent et la sagesse au monde bienheureux des clairvoyants.

Walther étudie avec rage. Trouvera-t-il dans ce grimoire la clé de son bonheur ? À mesure qu’une à une les pages se succèdent, son angoisse devient croissante. Il est à la dernière page. Il tremble. La trouvera-t-il ? Plus qu’une phrase encore ! Une ligne ! Ah ! c’est horrible. Encore un mot. Serait-ce la révélation qu’il cherche ? Dans un mouvement de découragement il ferme les yeux pour ne pas s’abîmer dans la déception affreuse qui le précipitera dans les profon-