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L’ÉLÉGANTE VENGEANCE

Et Lisiade sourit.

Elle avançait d’un pas lent, suivie de ses dames d’honneur. Toutes leurs chevelures d’or brillaient, éparses au soleil ; leurs têtes étaient ceintes de grosses résilles ; elles portaient toutes, à la mode de Béatrice, des robes tombantes en velours de Gênes, et chacune portait à la main un petit sac en filigrane de Sicile, doublé de soie chinoise.

La belle bellissime s’élança vers Lisiade et appuya ses deux mains sur son épaule. Son regard, vaincu par l’amour, enveloppa son époux d’une suave caresse. Lisiade baisa les mains ployant sous les perles.

— Excusez-moi, très chère ; je vous laisse auprès de notre gentilhomme de Florence ; je dois parler à vos dames d’honneur ; m’accordez-vous cette grâce ?

— Revenez vite, fit-elle d’une voix suppliante.

Lisiade sourit tendrement, esquissa un geste familier de congé et partit, suivi de toutes ces longues et flottantes chevelures d’or dans lesquelles s’ajoutait tout l’or du soleil.

Mattacchione étouffa un sentiment de plaisir diabolique. Que ce corps de belle Vénitienne était harmonieux ! Il détailla les épaules blanches, presque grasses, un peu tombantes ; cette belle poitrine profondément basse qui celait le mystérieux de sa beauté sous les plis du velours ; et cette respiration lente et vigoureuse qui torturait les sens ! Ses yeux s’appesantirent sur les hanches bien démarquées, soutenues par des jambes fortes et hautes, dont la démarche grave trahis-