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LE SALUT DU MAL

— Vous disiez, reprit alors Doña Juana ? Je crois que vous disiez : « Je suis vieux. »

Ces paroles le firent tressaillir.

— Oui, je suis vieux garçon et, par conséquent, ma jeunesse, dont je ne regrette pas la saveur des souvenirs n’a pas été consacrée au salut de mon âme. Mais, à présent, j’y pense.

— Ces dernières paroles vous honorent, repartit Juana. Voulez-vous que nous disions le rosaire ensemble ?

Les petits yeux de Don Perez clignotèrent libidineusement.

— Oh non !… Mais voilà, je ne vous ai encore rien expliqué. Dans la crainte de damner mon âme à tout jamais, j’ai cherché un directeur de conscience. On m’a vivement conseillé de m’adresser au Père Diego. Il m’a dit : « Arrière, Loñogo de Gomorrhe ! » J’ai eu peur, je vous l’avoue, très peur. Puis il a ajouté : « Allez trouver Doña Segrario Jesusa de Buenapaz et dites-lui que vous venez de ma part. C’est une âme sainte, quoi qu’en disent les autres. Elle communie avec le Seigneur. Elle s’inspirera de la grâce de Dieu et vous parlera ensuite. S’il y a un salut pour vous, elle seule pourra vous le faire gagner. » Et avec cela, il vous écrivit un mot qu’il me chargea de vous transmettre.

Nonchalamment, Doña Juana tendit la main. Elle déchira le cachet ecclésiastique qui scellait le billet et lut :