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V

Bientôt je partis pour Surpré, inquiète et entraînée, pour complaire à Jérôme et pour le voir. Je me rappelle le jour de mon arrivée. C’était le matin ; j’étais troublée. Je me remis bientôt. Jérôme était beau et charmant. Je m’animai enfin, je retrouvai mon assurance. Son père me montrait de l’intérêt, mais il observait beaucoup la conduite de son fils près de moi. Il ne craignait peut-être pas une épreuve qui séparât à jamais son fils des femmes. Ce séjour à Surpré fut très-extraordinaire. Ce qui s’y passa est presque incroyable. Un homme de vingt-huit ans en présence d’une maîtresse de vingt-deux ans, et qui ne sait ni s’il l’aime, ni s’il doit la quitter, qui par moment l’adore ou la fuit ! Certes, il y eut là pour moi de quoi perdre la raison ! moi, ignorante alors du caractère de Jérôme, et qui n’y comprenais rien ! Les premiers jours, il se montra amoureux ; il m’emmenait dans des promenades solitaires au jardin : j’y voyais son émotion et son trouble.

Un de ces jours-là, madame de Surpré, sa tante, donna un concert au milieu de la journée ; des voisins vinrent faire de la musique. Je me souviens de mon exaltation durant ce concert. Je me croyais moins aimée ; je