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gretter un attachement qui me met à une épreuve à laquelle peu d’hommes ont résisté. »

Dans d’autres lettres il me pria de lui confier mes impressions, mes peines : « Les miennes sont à vous, disait-il, entièrement à vous, mais tout vous appartient, et je ne saurais rien vous soustraire, car rien ne m’atteindra dorénavant d’une manière durable que par vous. Je suis tellement abrité par votre amour, je me sens si fort de sa possession, que je puis, mieux qu’un autre, me rire de la fortune ; vous êtes seule ma destinée, et je n’ai point d’autre superstition. Oui, régnez, régnez ; que votre empire soit sans limites et sans fin. Si jamais être humain a été fier de sa liberté, je le suis de ma servitude ; je les porte orgueilleusement, ces chaînes qui me lient éternellement à vous. »

La passion avait complété sa pensée et laissé loin les jouissances de celle-ci ; il ne comparait pas leur empire.

« La passion seule, écrivait-il, révèle ses propres secrets, ensevelis pour toutes les autres facultés de l’âme. Dans la passion, tout est nouveau et imprévu, tout frappe inattendu avec la force de la conviction intérieure. C’est la mer sans rivage, sur laquelle on navigue sans pilote, toujours battu par la tempête, toujours étonné de n’avoir pas péri. Croirait-on d’avance qu’une si faible machine suffirait à tant d’émotions ? »

Un jour de pluie il m’écrivait : « Je regarde de la fenêtre ce temps que vous aimez, mais qui ne se laisse pas approcher de trop près. »

Il me suppliait de combattre la douleur : « Oui, vous