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ces esprits, trouverons-nous un esprit véritable ? Hélas ! Montesquieu, Rousseau, avouez-vous ces parcelles qui nous illuminent ? Et voyons l’Amérique et sa médiocrité. Non, non, la France ne peut long-temps supporter cette bassesse. Au premier jour, si l’on n’y prend garde, elle va suivre, sans science et sans conditions, quelque chef qui la rappellera à son caractère, à la gloire, à l’honneur.

On a dit que le talent[1] n’avait pas besoin de protection, qu’il se suffisait à lui-même ; mais cela n’est pas vrai. Loin de là, modeste, fier, souvent timide, vivant à part, si l’exercice de notre esprit nous enchante et nous fait croire à chacun que nous avons un esprit supérieur, le talent est moins dupe de cette illusion ; il la comprend vite, il la remarque chez les gens communs ; rêvant et désirant plus qu’il n’obtient, ses travaux, si loin de ses espérances, l’affligent plus qu’ils ne le charment. S’il sent sa force enfin, s’il en est sûr, c’est une force mortelle, pleine de faiblesse, c’est cette raison de Pascal qui fait tristes ceux qui la possèdent. En appelant aux affaires le talent privé de richesses et d’appui dans un monde où la richesse garde encore une grossière influence, on l’a conduit à des séductions fortes et à des douleurs vives ; s’élevant dans l’obscurité au dessus de la vie commune, profitant du repos pour l’étude, s’emparant du ciel, du monde, mesurant la grandeur des astres, s’informant si une seule loi générale conduit l’univers, si Dieu est soumis lui-même à une nécessité matérielle, sa richesse lui importait peu, et la petite maison de Galilée à Arcetri suffisait à celui qui lut dans la voie lactée et nous révéla des milliers d’étoiles. Mais le talent appelé aux affaires laisse à l’entrée du forum le doux manteau de l’académie ; il laisse la simplicité

  1. M. Odillon-Barrot.