Lui et Castruccio avaient pris des vues et des vertus différentes. À quoi Castruccio eût-il sacrifié son ambition ? où employer son énergie ? Et lord Clive eût-il daigné fonder pour lui un empire dans les Indes, faible, éphémère ? Il songeait à une grande nation, à la sienne ; il combattait sous ses ordres, pour un but certain ; en un seul jour il disposait de plus d’hommes, de villes, de trésors, que Castruccio n’en employa dans toute sa vie ; les sommes qu’il donne aux princes dépouillés sont prodigieuses ; il paie avec l’or des Indes l’asservissement des Indes. Le génie brut peut préférer l’existence de Castruccio ; mais le génie cultivé, qui voit loin, qui cherche la grandeur des résultats et de l’avenir, préfèrera la carrière de l’Anglais.
Dans nos temps nous n’avons plus de gloire isolée ; tout homme s’unit à son espèce, et travaille pour elle ; la pensée est désormais unie à l’action, car l’action bien comprise est à la fois utile et glorieuse.
CHAPITRE XXXII.
Il est une démocratie-modèle qui a dominé l’Europe, qui est finie dans sa base et son but, mais dont les formes restent comme un chef-d’œuvre. Recrutée dans tous les rangs et au plus bas étage, ses grands hommes étaient les charpentiers, des pâtres ; l’un avait conduit les vaches, l’autre labouré la terre. Jamais on ne vit rien de si noble que ces parvenus. Ils eurent les maximes les plus fermes, la conduite la plus habile ; jamais aristocratie héréditaire ne brilla d’un tel éclat. Une hiérarchie séparait les différens degrés de cette démocratie : en bas, des assemblées