Pauvre garçon
— Y a qu’à moi que ça arrive, ces machines-là !
Mon respect bien connu pour la vérité m’oblige à confirmer l’exactitude du dire de mon ami.
Des catastrophes ? Non, pas des catastrophes ; mais un bombardement sans cesse ni trêve de petites mistoufles comiques, pittoresques et jusqu’alors invues.
Il a fini par en prendre son parti, le pauvre mésaventurier, et lui-même nous compte ses plus récentes histoires avec un bon sourire ahuri, mais résigné.
— Y qu’à moi que ça arrive, ces machines-là ! conclut-il sagement.
Ça m’est toujours une bonne fortune de le rencontrer, certain que ma soif de nouveau trouvera son compte — un peu cruel, peut-être — au récit d’infortunes inédites.
— Quoi de nouveau, mon vieux ? fais-je hypocritement. Toujours content ?
— Content ?… Tu te moques de moi, dis ? Content ! Enfin, je me fais une raison ! Et toi ?
— Parfaitement heureux, merci, plus heureux même que je mérite.
— Ça ne se mérite pas, le bonheur… malheureusement !… Car ça commencerait bien à être mon tour.
— Encore embêté ?
— Bien sûr !… Imagine-toi que j’ai couché au poste, lundi dernier.
— Couché au poste, toi ! le plus tranquille des hommes !
— Parfaitement ! Moi, le plus tranquille des hommes !… j’ai couché au poste !
— Et pour quelle cause ?
— Pour cause de soûlographie.
— Pour cause de soûlographie, toi ! Le plus sobre des hommes !