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À cette époque, la muse de la Prose n’avait que légèrement effleuré, du bout de son aile vague, mon front d’ivoire.

D’ailleurs, la nature de mes occupations était peu faite pour m’impulser vers d’aériennes fantaisies.

Je me préparais, par un stage pratique dans les meilleures maisons de Paris, à l’exercice de cette profession tant décriée où s’illustrèrent, au dix-septième siècle, M. Fleurant, et, de nos jours, l’espiègle Fenayrou.

Dois-je ajouter que le seul fait de mon entrée dans une pharmacie déterminait les plus imminentes catastrophes et les plus irrémédiables ?

Mon patron devenait rapidement étonné, puis inquiet, et enfin insane, dément parfois.

Quant à la clientèle, une forte partie était fauchée par un trépas prématuré ; l’autre, manifestant de véhémentes méfiances, s’adressait ailleurs.

Bref, je traînais dans les plis de mon veston le spectre de la faillite, la faillite au sourire vert.

Je possédais un scepticisme effroyable à l’égard des matières vénéneuses ; j’éprouvais