Page:Allaire - La Bruyère dans la maison de Condé, t. 1, 1886.djvu/77

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en son nom, disposer de la dite charge eu favenr de M. Jean de la Bruyère, avocat, qui était capable maintenant de le payer en beaux deniers sur la succession de son oncle.

La Bruyère avait donc enfin pris son parti. Il prouva ainsi à sa famille et à ses amis que sa philosophie ne lui était point inutile. — Le 23 mars 1674, parurent ces lettres patentes du roi : « Louis, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre, à tous ceux qui ces présentes lettres verront, Salut. Savoir fesons que nous à plein confiant en la personne de notre cher et bien-aimé M. Jean de la Bruyère, advocat au Parlement, et en sa suffisance, loyauté, prudhommie, expérience au fait des finances, fidélité et affection à notre service, à iceluy, pour ces causes, avons donné et octroyé, donnons et octroyons par ces présentes l’office de notre conseiller, trésorier de France et général de nos finances en la généralité de Caen. » Le roi donnait en même temps à la Bruyère les honneurs, autorités, prérogatives, prééminences, privilèges, franchises, libertés, exemptions, gages, droits et fruits, profits, revenus, émoluments attribués au dit office et y appartenant : à la seule condition qu’il n’y eût au dit bureau des finances de Caen aucun parent ni allié au degré prohibé par les ordonnances royales.

Le 27 mars 1674, la Bruyère fit le versement de 1,696 francs pour les droits et marcs d’or de la charge qui lui avait été donnée. Ensuite le chancelier de France, M. d’Aligre, qui avait dû connaître l’oncle et parrain Jean de la Bruyère, secrétaire du roi, prit le serment de notre auteur par mandement de Sa Majesté, ainsi qu’il est dit dans les lettres patentes. À tout cela, aucune difficulté. Mais la, Bruyère dut aller à Rouen remplir d’autres formalités qui furent beaucoup plus longues et plus ennuyeuses. Il venait d’entrer dans sa trentième année lorsqu’il se présenta devant les officiers de la chambre des comptes de Normandie. Ils furent convoqués pour le 23 août 1674 ; ils ne se trouvèrent pas en nombre ; le semestre fut remis à un autre jour. Peut-être l’information nécessaire sur l’âge, vie, mœurs, vacations, religion, extraction, comportements et moyens de M. Jean de la Bruyère n’était-elle pas tout à fait achevée. Elle le fut le 11 septembre ; et le 13 de ce mois, la chambre des comptes de Rouen s’étant réunie, maître Michel Tesson, commis au greffe de la chambre, tenant le plumitif, la Bruyère fut amené avec tout l’appareil d’usage et introduit devant L’assemblée, que présidait M. de la Place.