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fatigue, Valterre se leva et fit rapidement sa toilette, aidé par le valet de chambre. Le vicomte ne désirait pas faire de vieux os, d’ailleurs. Il n’était attaché à personne sur terre par des liens méritant un regret. Il était libre, libre et seul, et, pourvu qu’il s’amusât, il n’en demandait pas davantage à sa destinée. Aussi avait-il vécu gaiement jusque-là, faisant plus d’élevages pour la haute bicherie parisienne qu’un paysan normand pour les concours agricoles. Selon son expression, il avait, à lui seul, pendu plus de crémaillères que Montluc ne pendit de Huguenots et, de toutes les premières pierres posées par lui dans les immeubles des demoiselles, il disait fièrement qu’on aurait pu construire une église.

Cette existence échevelée et fantasque ne modifia guère son naturel, mais elle altéra profondément sa santé. À vingt-cinq ans, le joyeux vicomte se voûtait légèrement et son corps amaigri faisait le désespoir du tailleur chargé de l’habiller ; mais l’œil conservait son regard spirituel et bienveillant ; la bouche, un peu grande, souriait ; les dents étaient toujours blanches et admirablement rangées. Ses cheveux, par exemple, ses beaux cheveux blonds, jadis souples. comme la soie et semblables à des fils d’or, à présent, laissaient entrevoir les blancheurs du crâne et deviner les tourmentes de la vie. Parfois, aux lendemains de fête, le vicomte se souvenait