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hara-kiri

Levrault se retourna gaiement et, poussant Taïko devant lui, il lui glissa à l’oreille :

— Nous allons rire !

— Toutes les mains se tendaient vers l’étudiant :

— Tu vas bien, petit ?

— Comment ça va, mon cher ?

— Veux-tu prendre un soyer avec nous.

— Alors Levrault présenta gravement le prince Taïko-Fidé, un de ses bons amis, un Chinois — pour tout le monde, Fidé était un Chinois — Et tous, en riant, tendirent la main au prince chinois, s’amusant de l’idée qu’avait eue leur camarade de trimballer cet exotique.

Une des femmes, la grosse Blanche Timonnier, qui venait d’avaler goulûment quatre ou cinq babas, s’assit à côté de lui, le regardant parfois avec de grands jeux de prunelles, comme si elle eût voulu l’inonder d’amour et laissant passer au coin de ses lèvres un bout de langue effilé et rose comme celui d’une chatte.

Taïko en avait remarqué une autre, qu’on nommait Rosette. Elle ne parlait guère, mais elle était belle, d’une beauté un peu froide, et le jeune homme pensait qu’on était heureux de posséder une si adorable maîtresse. Malheureusement, Rosette n’était pas seule, et le Japonais comprenait qu’il n’y avait rien à faire, au moins ce soir-là. D’ailleurs le souvenir de Jeanne, réminiscence de désirs à moitié satisfaits, chantait en