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blanches. Fils d’un médecin fort connu, il préparait son doctorat avec une grande facilité de travail, un bonheur insolent dans ses examens, promenant à travers le quartier Latin ses airs demi-sérieux, demi-gouailleurs, s’étant fait déjà, à vingt ans, une tête d’avoué ripailleur ou d’avocat de belles petites. En lui-même, il s’amusait extraordinairement de l’aventure de ce Japonais de haute naissance, tombant chez les Tristapattes, dans une bande de rapins, de pions sans ouvrage comme Boumol, de poètes et de petits journalistes, jetant son or aux filles de Bullier, content de cette existence et croyant avoir vu Paris. Alors, il racontait à Taïko que, par delà les ponts, couraient d’immenses boulevards et de longues avenues que, peut-être, il avait traversés en visiteur rapide, sans se douter que la variété d’aspect correspondait à une complète diversité de mœurs. Il lui décrivait tout un Paris différent, semé de riches hôtels, de splendides voitures, où chaque jour était pris par le plaisir, où la nuit ne suffisait pas à l’activité humaine, une ville où des jeunes gens possédaient des fortunes royales, avec des théâtres pleins de femmes splendides, à la voix harmonieuse, aux gestes superbes, qui se donnaient seulement en échange de monceaux d’or et de pierreries.

Le Japonais l’écoutait dans une sorte d’extase, les yeux dilatés, puis, se rappelant ses premières