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un talent de comédienne remarquable. Il faut le dire, la fatuité servait seulement de prétexte à ce nouveau désir. Depuis quelque temps la maîtresse d’Estourbiac, prise d’une sorte de regain de débauche, Juliette désirait se soustraire à la surveillance inquiète du prince et il lui avait paru commode d’entrer au théâtre. Estourbiac, abusant de ce caprice canaille, ne se gênait pas avec elle, d’autant qu’il commençait à en avoir par dessus la tête. Prise d’une rage fougueuse, elle se cramponnait à cet amant de cœur, oubliant presque sa sagesse calculatrice, allant jusqu’à offrir de l’argent, avouant qu’elle possédait des rentes solides. Le journaliste un peu épouvanté refusa. Pourtant une malechance momentanée l’avait réduit à la situation de reporter théâtral au Forban, journal de coulisse et de finance, où il écrivait sous le pseudonyme de Fracasse. C’est alors que Juliette conçut l’idée baroque de lui faire remettre par Fidé cette somme qu’il refusait de sa main, sous le prétexte de favoriser son entrée au Vaudeville. Elle inventa tout un roman. Il fallait solder le dédit d’une comédienne qu’elle remplacerait, et s’assurer l’appui de quelques personnalités influentes, mais très avides. Enfin, le directeur du Forban, petit journal de chantage qui justifiait bien son titre, exigeait qu’on le payât pour laisser insérer une réclame indispensable en faveur de Juliette…