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CYBÈLE

qui convenait en tous points à ses traditionnelles tendances unionistes et particularistes en même temps. C’était toujours la nation indomptable qui jadis, chaque fois que l’Europe se courbait asservie, seule se dressait et défiait le dominateur, qu’il fût le César de Rome, d’Aix-la-Chapelle, de Paris ou de Berlin. Là aussi, comme chez les autres anciens peuples, s’étaient conservés avec la même persistance les caractères anciens de la race qui se reconnaissaient encore sous les formes accomplies de la civilisation présente.

L’Espagne un peu dégénérée du siècle de Marius et qui ne rappelait plus guère alors les grandeurs de son passé, mais qui, par attitude naturelle levait encore la tête et regardait toujours au plus haut, s’était ressaisie et sauvée de la décadence dans un de ces élans qui déroutent ceux qui croient le mieux la connaître, et qui cette fois, contre toute apparence, se porta fiévreusement vers toutes les formes du savoir humain. Et l’on vit, à l’étonnement général, surgir de cette nation assoupie une nombreuse pléiade d’artistes, de savants, d’écrivains qu’animait une élévation d’âme extraordinaire et qui prirent d’emblée la tête du mouvement intellectuel au milieu d’une Europe qui avait vraiment grand besoin d’être relevée de l’abaissement moral et de la platitude où l’avait réduite un positivisme tout mercantile et matériel.