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CYBÈLE

vers l’ancien monde. La petite ramification du Gulf-Stream qui longeait le nord-ouest de l’Europe suffisait autrefois à donner à la Bretagne, à l’Irlande et même à la Norwège une température plus douce que ne le comportait leur latitude ; il était évident que si la totalité de ce chaud courant de plus de dix degrés de largeur, au lieu d’aller se perdre en majeure partie sur les côtes de l’Afrique tropicale, venait tempérer l’atmosphère de ce nord-ouest européen, une région considérable s’en trouverait transformée au grand avantage de son habitabilité et de ses cultures. Pour songer à un projet de cette importance qui eût semblé absolument fou aux anciens Européens toujours divisés d’intérêts et appauvris de sang et d’argent par leurs guerres continuelles, il fallait tout de même malgré tous les progrès moraux et matériels accomplis, une certaine audace aux promoteurs de l’entreprise. Mais comme les moyens de l’époque étaient à la hauteur de n’importe quel travail, si colossal fût-il, on se mit résolument à l’œuvre et elle réussit parfaitement : une jetée incomparable s’amorça aux Berlingues en vue des côtes de Portugal et s’avança peu à peu jusqu’aux îles Açores, barrant la voie à la partie méridionale du courant qui fut de force ramenée dans la direction nord, de manière à ne plus former avec sa branche européenne qu’un seul et même courant.