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CYBÈLE

faite à notre ami, il en arrivait maintenant à confondre dans sa pensée la réalité et le rêve. Tant d’aventures inouïes, tant de choses surnaturelles se succédaient coup sur coup, qu’il y avait bien de quoi troubler le cerveau le mieux équilibré, et perdre toute notion du vrai et du faux, du possible et de l’impossible. Il faut dire aussi que depuis que s’était exercé sur lui cette mystérieuse influence de l’étoile Gemma, un état tout particulier et indéfinissable le faisait vivre dans une telle disposition d’esprit qu’il n’eût souvent pu dire s’il veillait ou s’il dormait. Ou ses songes présentaient la même netteté d’images que les réalités de l’état de veille, ou bien ce dernier état ne semblait pour lui qu’un enchaînement d’illusions semblables à des songes. De plus, il ne pouvait éviter que les deux mondes auxquels il tenait par son passé et par son présent ne se confondissent parfois dans sa mémoire, et par le fait même de cette phénoménale dualité d’existence, il devait par exemple lui arriver plus d’une fois de confondre entre eux les personnages qui touchaient de plus près à sa vie intime, et même d’identifier dans sa pensée ses anciens et ses nouveaux amis de la terre et de Cybèle. Cette parole si ancienne et si philosophique : « La vie n’est qu’un songe, » n’a jamais été appliquée avec plus de vérité qu’à cette nouvelle existence de Marius.